HISTOIRE DE WOIPPY - PETIT HISTORIQUE

La fondation de WOIPPY remonte probablement à l’époque gallo-romaine, autour d’un domaine agricole (villa) situé le long de la voie Metz-Trèves, et dont les spécialistes de la toponymie pensent qu’il appartenait à un propriétaire du nom de Wapus. La première mention écrite du nom figure dans un bref du pape Calixte II daté de 1123, orthographié Guapéio. Mais pendant longtemps on ignorait à quand y remontait la présence humaine : c’est désormais chose faite, grâce aux fouilles archéologiques menées sur le ban de la commune à l’automne 2007 par le Pôle d’archéologie préventive de la CA2M, sur le projet de ZAC des Côteaux (2,9 hectares). Ces fouilles ont permis de faire découvrir des traces d’activités humaines datant du néolithique et du Premier âge du fer.


Sondages archéologiques sur la ZAC des Côteaux

Précisons d’abord que la commune de Woippy possède un environnement archéologique riche, dont les vestiges s’étendent des périodes protohistoriques au Moyen Âge : âge du Bronze final, c’est-à-dire du XIIe au IXe s. av.J-C. (route de Thionville et lieu-dit Saint-Vincent), Premier âge du Fer ou Hallstatt, soit VIIIe-VIIe s. av.J-C. (Barreau de La Maxe et Grandes Tapes), Second âge du Fer ou La Tène, c’est-à-dire à partir du VIe s. av.J-C. (nécropole de Saint-Vincent et Bellevue), époque gallo-romaine (vestige d’une villa à Saint-Vincent), époque mérovingienne (Grandes Tapes). Cependant, trois occupations humaines antérieures aux périodes protohistoriques ont été identifiées sur le site de la ZAC des Côteaux, ce qu’attestent trois outils taillés dans des galets de quartzite de la Moselle, dont un racloir, datés du Moustérien (– 50 000 ans), des outils agricoles de l’époque du Rubané (début du Néolithique, – 5300 à – 4900) et des du Néolithique moyen (– 4400 à – 4300).
L’analyse des restes de graines, noyaux de fruits et coquilles a permis d’identifier l’orge vêtue, le blé épeautre, le millet commun et la lentille. À la fin du Premier âge du Fer, l’environnement naturel de Woippy est essentiellement composé de parcelles agricoles et de prairies ; la culture du millet se pratique sur de petites surfaces, tandis que les autres céréales peuvent être produites de manière extensive. Les hommes présents à Woippy avaient un régime alimentaire basé sur la consommation des céréales, mais ils cultivaient sans doute des légumineuses dans de petits jardins. Le millet et l’orge pouvaient également être utilisés comme fourrage d’hiver pour le bétail. Nous sommes donc en présence d’un établissement agro-pastoral situé à proximité d’une forêt humide (dont l’existence est révélée par l’analyse des pollens : aulne, noisetier, chêne).
Les vestiges de la ZAC des Côteaux sont caractéristiques des habitats de l’extrême fin du Premier âge du Fer : bâtiment à quatre et à six poteaux, silos, fosses. L’habitat, construit en matériaux périssables, présente des vestiges discrets. Petite installation agro-pastorale, Woippy se distingue par la présence de nombreuses structures de stockage : silos, greniers et grandes jattes semi enterrées permettaient une conservation des récoltes à la fois souterraine et aérienne. Le bâti de l’époque se constitue d’une ossature de bois badigeonnée de torchis. Les archéologues ont pu recenser sur le site six silos d’un volume de 4 m3 et pouvant contenir environ trois tonnes de céréales, deux bâtiments à six poteaux et six petits établissements surélevés assimilés à des greniers.
L’activité domestique est illustrée par la présence d’objets évoquant des activités de tissage (quatre fusaïoles et un peson servant au lestage des fils), de production de poterie (5163 tessons, soit 81 kilos) et de mouture du grain. La poterie se répartit en céramique de stockage et en céramique à vocation culinaire (nombreuses écuelles à bord rentrant et de pots de formes diverses) ; une assiette et plusieurs coupes ornées de peinture rouge évoquent une production plus fine (vaisselle de présentation).


Reconstitution d’une maison


Du matériel de la vie quotidienne à Woippy


Le nom de Woippy, retranscrit en latin Guapeio (ou Guepeio), serait donc à l'origine du nom de la ville. Un nom dont l'orthographe a beaucoup varié au cours des siècles, puisque l'on trouve Wapey, Waippey, Wauppey, Wauppei, Vapy, Wappy, Woipez, Weppy, Houeppy, Woipy et finalement, depuis le XIXe siècle, Woippy.

À l'époque carolingienne, en tout cas avant l'an Mil, Woippy devient terre d'Eglise, dont les revenus sont affectés (ce que confirmait en fait le texte de 1123) au trésorier de la cathédrale de Metz. En 1511, le trésorier Pierre de Accolas ayant résigné sa charge, le village passe sous la tutelle du Chapitre de la cathédrale de Metz, qui le fait administrer par un chanoine prévôt : le Chapitre restera seigneur de Woippy jusqu'à la Révolution (ce qui explique que sur le blason de Woippy figurent les armes du Chapitre, à côté du célèbre Graoully).


Définition héraldique et légende du Graoully

Aux XIVe-XVe siècles, Woippy est, comme l'ensemble du Pays messin, le théâtre de guerres opposant Metz aux principautés voisines, notamment le duché de Lorraine. Le village, qui compte 100 à 150 habitants en 1404, est attaqué, pillé, brûlé, rançonné à plusieurs reprises : en 1324 lors de la guerre dite des Quatre Seigneurs, en 1444 lors du siège de Metz par le duc René d'Anjou et le roi de France Charles VII, en 1475 lors de l'incursion du duc René II de Vaudémont. Pour le protéger, mais aussi pour matérialiser sa tutelle, le Chapitre fait construire le château (rue de Briey) et la Haute Maison (rue de l'Eglise), encore existants de nos jours, notamment parce qu'ils ont échappé à la destruction des bâtiments proches de Metz sur ordre du duc François de Guise lors du siège de Metz par l'empereur Charles-Quint.


Le château de Woippy
(gravure de Bellevoye)


Le château de Woippy au début du XXe siècle


La Haute-Maison de Woippy
(gravure de Bellevoye)

Au XVIIe siècle, la guerre de Trente Ans et les premières guerres du règne de Louis XIV sèment la terreur et la désolation dans le Pays messin, et Woippy connaît à nouveau la peur et la misère. De 1635 à 1646, les habitants (entre 200 et 250) ne subissent pas moins d'une dizaine d'agressions, allant de l'intimidation au pillage et du rançonnement aux destructions. Le jour de Pâques 1636, par exemple, Woippy est attaqué par une bande de Croates commandés par le fameux capitaine Huaux, originaire d'Ars-sur-Moselle. Une année terrible, car la peste vient ravager Metz et ses alentours. Une nouvelle incursion de 300 cavaliers espagnols et croates sème la terreur à Woippy le 20 août 1642, puis le 2 février 1643. Mais c'est le 29 mars 1668 (nous sommes durant la guerre de Dévolution, qui oppose Louis XIV à l'Espagne) que l'histoire locale a surtout retenu, car cette fois les habitants de Woippy organisent leur propre défense : Woirin Lapied, François Mangenot et trois autres paysans "s'estant retirez dans la Haute Maison firent un grand carnage quoyque le feu fut déjà dans une des chambres, et de la terrasse tuèrent ou blessèrent mortellement quantité des ennemis" (J. Ancillon) : plus de quarante de ces derniers sont tués, dont leur commandant.

Entre les années 1680 et la Révolution, le village vit paisiblement, et sa population s'accroît, passant de 250-300 habitants à la fin du XVIIe siècle à 600-650 en 1789. Une population pauvre, qui vit du travail de la terre, et surtout de la vigne. Lorsqu'ils rédigent leurs Cahiers de doléances le 9 mars 1789, les habitants se définissent d'ailleurs comme " de pauvres habitants de campagne, tant laboureurs-fermiers que vignerons à gages et manœuvres-journaliers, épuisés de misère et de paiements tant pour les deniers royaux que pour les travaux des routes ". L'une des principales conséquences de la Révolution est la fin de la propriété religieuse à Woippy, et son passage entre les mains de quelques familles de la bourgeoisie messine ou de quelques notables locaux. C'est ainsi que les familles Séchehaye, Pécheur, Marcus, s'approprient fermes, terres et maisons. Riche héritière de la fortune familiale, Marie Rose Marcus fait construire à ses frais, sur un de ses terrains, la nouvelle église de Woippy, consacrée en 1850.


L'église de Woippy dans les années 1930

Depuis 1810, la commune de Woippy s'est agrandie de Thury (La Maxe) et du hameau de Ladonchamps. Alors que, supportant mal une fusion qui ne les satisfait pas, les habitants de La Maxe retrouvent leur autonomie en 1867, ceux de Ladonchamps (du nom du château et de la famille châtelaine) restent unis à Woippy, et aujourd'hui encore, appelé Saint-Rémy, le hameau est toujours dans le ban communal woippycien.


Le château de Ladonchamps

Les années 1850-1870 sont pour Woippy un tournant, avec l'arrivée des premiers progrès : construction de la voie ferrée Metz-Thionville (1854), création d'un atelier de galvanisation du fer - c'est la première implantation industrielle - et surtout, en 1868, l'introduction de la culture de la fraise par Jacques et Dominique Vion, qui ramènent de Plougastel-Daoulas en Bretagne des plants qui vont faire la fortune de Woippy, notamment au cours des années 1920-1939.


Les producteurs de fraises devant l'ancienne chapelle, devenue
local du Syndicat des Producteurs, vers 1930
(au centre, coiffé d'un panama, le marquis Henry de Ladonchamps)



La récolte des fraises vers 1930

En 1870, pour la première fois depuis deux siècles, les Woippyciens entendent le bruit du canon. Le 7 octobre, en plein siège de Metz, se déroule la bataille de Ladonchamps (ou combat de Bellevue), au cours de laquelle le général Emile Armand Gibon, qui commande le 25e régiment de ligne, est mortellement blessé (il est enterré dans le cimetière de Woippy). Comme Metz et la Moselle, Woippy est annexé à l'Empire d'Allemagne. Les Allemands y construisent deux forts, Kameke et Hindersin, devenus après 1918 les forts Déroulède et Gambetta. Durant l'annexion, la population s'accroît (1054 habitants en 1871, 1567 en 1910), la culture fraisière se développe, et pour les besoins de son exportation vers les villes allemandes qui en sont friandes, une gare est construite en 1908, qui remplace la "halte" aménagée à la Maison Rouge en 1901.


Le général Emile Armand Gibon
(mort à Woippy le 19 octobre 1870)


Croix érigée à la sortie de Woippy en remerciement de
" la protection divine pendant 1870 "


Le fort Kameke, construit de 1875 à 1880
devenu après 1918 le fort Déroulède

Après 1918, la fraise et l'industrie font bon ménage. Sous l'impulsion du marquis Henry de Ladonchamps, la production fraisière s'organise, et en 1926 est créée la fête de fraises, encore célébrée aujourd'hui bien que la fraise ait disparu de Woippy. Le 17 juin 1940, Woippy est occupée par les Allemands, qui procèdent en novembre à l'expulsion de 500 habitants vers le sud-ouest de la France. Le long de la route de Metz à Thionville ils implantent une usine travaillant pour la Luftwaffe, la Hobus Werke (elle est bombardée à deux reprises en 1944), et installent un camp de détention, assimilé à un véritable lieu de déportation comme celui de Queuleu. Woippy est libéré le 16 novembre 1944 par le 377e régiment d'infanterie américain. Le village est en grande partie détruit.


Un fantassin américain lors de la libération de Woippy

Après la guerre, et surtout à partir de 1960, Woippy connaît une mutation démographique et économique considérable. Avec la construction du Quartier du Roi, et des quartiers de Saint-Eloy et de Boileau-Pré Génie, la commune passe de 3000 habitants en 1954 à plus de 13 000 au début des années 1970 (14 000 aujourd'hui). Les activités économiques évoluent et se diversifient : la culture fraisière a disparu, l'industrie se développe (secteur métallurgique surtout), les activités tertiaires et commerciales se multiplient. Parmi les entreprises implantées sur Woippy, quatre représentent l'essentiel de l'activité : le quotidien régional Le Républicain Lorrain, la gare de triage (construite vers 1960, elle est la première de France), l'entreprise de logistique Faure et Machet, et le 9e régiment du matériel (autrefois Etablissement Régional du Matériel).


La gare de triage de Woippy

Sur le plan politique, Woippy est resté entre 1977 et 2001 une commune de gauche, dirigée par une municipalité à majorité socialiste (Sébastien CANSELL, maire de 1977 à 1998. Jérôme PRACHE, maire de 1998 à 2001). Conquise aux élections municipales de 2001 par le RPR François GROSDIDIER (élu député UMP en juin 2002), elle poursuit son développement dans le cadre de la Communauté d'Agglomération de Metz Métropole. Aux élections municipales de mars 2008, François GROSDIDIER est réélu au premier tour, face à quatre listes concurrentes.


Sébastien CANSELL
1977-1998

Jérôme PRACHE
1998-2001

François GROSDIDIER
2001 ...


Plan de WOIPPY au début du XIXe siècle
(extrait du premier cadastre de Woippy)


BIBLIOGRAPHIE :

- QUEPAT (Nérée, anagramme de René Paquet), Histoire du village de Woippy, 1878.
- CATHERINE (Gilbert), Petite histoire de Woippy, 1972, 99 pages
- BRASME (Pierre), Woippy, village du Pays messin (1670-1870), Editions Serpenoise, Metz, 1987, 399 pages.
- BRASME (Pierre), La fraise de Woippy, Editions Serpenoise, Metz, 1990, 229 pages.
- BRASME (Pierre), Woippy de 1871 à nos jours, Editions Serpenoise, Metz, 1994, 387 pages.
- BRASME (Pierre), NAUROY (Jean), THOEN (Philippe), Woippy, images d'autrefois, Editions Serpenoise - Société d'Histoire de Woippy, Metz, 1993, 64 pages.
- BRASME (Pierre), NAUROY (Jean), THOEN (Philippe), Woippy d'hier à aujourd'hui, Editions Serpenoise, Metz, 1998, 63 pages.
- Nombreux articles dans les Chroniques du Graoully, revue annuelle de la S.H.W.