HISTOIRE DE WOIPPY - LE BLASON DE WOIPPY |
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" Parti, au un de gueules au dextrochère de carnation vêtu d'azur, tenant une épée haute d'argent garnie d'or, accostée de deux cailloux aussi d'or, mouvant d'un nuage d'argent, au deux d'or au dragon de sable. "
Le blason de Woippy réunit les armes du Chapitre de la cathédrale de Metz (l'épée de la décapitation de saint Paul, son patron, et les deux pierres de la lapidation de saint Etienne, patron de la cathédrale de Metz et de la paroisse de Woippy), et le Graoully. Si celui-ci figure également, du moins sous la même forme qu'à Woippy, sur le blason d'Ancy-sur-Moselle et d'Orny, les armes du Chapitre se retrouvent exactement à l'identique dans une douzaine de communes (comme Hagondange, Montigny-lès-Metz, Rémilly, Argancy, Mécleuves, Fontoy...), et sans les pierres sur les blasons de Malancourt-la-Montagne, de Roncourt et de Jury (Armorial des communes du département de la Moselle).
Le mot " graoully " dérive
probablement de l'allemand " graülich " ou " groeulich ", qui
signifie horrible. Son orthographe a beaucoup varié au cours du temps : grolli,
growellin, graulin, grolly, graulli, graouilli et finalement graoully ou graouly. Certains
auteurs y voient une parenté avec le mot " gargouille ". Mais pour les Messins
et les habitants du Pays de Metz, le Graoully, c'est avant tout une légende, symbolisée
par un dragon qui figure sur plusieurs blasons de la région, notamment sur celui de
Woippy.
Comme toute légende, elle mélange histoire, symbolisme et imaginaire. Lorsqu'à la fin
du IIIe siècle saint Clément arrive à Metz pour évangéliser la région, le
christianisme est encore persécuté par les autorités romaines. Il cherche un lieu de
culte propice aux réunions discrètes et le trouve dans les ruines du grand
amphithéâtre, saccagé par les premières invasions germaniques et à l'écart de
l'enceinte toute récente. Sur ce fait, que l'on peut considérer comme historique, est
venue se greffer la célèbre légende : dès son arrivée à Metz, Clément est
sollicité pour débarrasser la région d'un monstre, serpent ou dragon, qui terrorise la
population et dont l'antre se trouve dans l'ancien amphithéâtre. Le saint, armé de la
foi du Christ, se rend à cet endroit, s'empare du dragon, le lie avec son étole, le
conduit sur la rive de la Seille toute proche et lui ordonne de traverser la rivière pour
ne plus jamais revenir (selon une autre version, saint Clément aurait noyé le Graoully
dans la rivière). Délivrés et reconnaissants, les habitants de Metz se seraient
convertis en masse à la religion de leur sauveur, devenu premier évêque de Metz.
Il faut souligner que cette légende n'apparaît qu'au VIIIe siècle, et son symbolisme
semble évident à une époque où le christianisme, sous l'impulsion des Carolingiens,
prend un nouvel essor en Occident et chasse le paganisme, représenté dans la légende
par le monstre. C'est au XIe siècle que l'animal figure pour la première fois dans une
procession messine, sous forme d'une bannière rouge surmontée d'une tête de dragon. A
partir du XIIe siècle, c'est l'effigie complète du monstre qui participe aux processions
de Saint Marc et des Rogations. Le maire de Woippy, village appartenant au Chapitre de la
cathédrale, avait l'insigne honneur de porter le Graoully lors de ces processions, et
c'est sans doute pourquoi ce dernier figure sur les armes de la commune. Au cours des
processions, lorsque le Graoully passait devant une boulangerie, le boulanger était tenu
de jeter un petit pain dans la gueule du monstre, et l'ensemble des pains collectés
servait de rétribution au porteur de l'effigie.
La présence du Graoully lors des processions de Saint Marc et des Rogations s'est
poursuivie jusqu'à la fin du XVIIIe siècle. Elle semble avoir été supprimée en 1786,
en raison des désordres qu'elle provoquait. A l'entrée de la crypte de la cathédrale se
trouve la dernière effigie du Graoully.
(Jean NAUROY, " Le Graoully ", Chroniques du Graoully, n°1, novembre 1991, pages 4-5)
(Dessin de Jeannine Boulay et Daniel Mercy)